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#SerialKiller : American Psycho de Bret Easton Ellis

Les meilleurs livres de serial killers, jour 24

1991. Tempête sur le monde du polar avec un roman très dérangeant : American Psycho de Bret Easton Ellis suscite en effet un énorme scandale. Extrêmement violent, misogyne, empli de pornographie : après avoir été refusé par l’éditeur attitré de l’auteur, le livre choque l’Amérique et oblige Easton Ellis à se protéger, garde du corps à la clé. Au-delà du scandale, ce livre reste un chef-d’œuvre de fiction sur le serial killer et une vision sans concession d’une génération perdue.

L’histoire :

Patrick Bateman, 27 ans, est un flamboyant golden boy de Wall Street. Patrick est beau, riche et intelligent, comme tous ses amis. Il fréquente les restaurants les plus chics, où il est impossible d’obtenir une réservation si l’on n’est pas quelqu’un, va dans les boîtes branchées et sniffe de temps en temps une ligne de coke. Mais Patrick a une petite particularité : c’est un psychopathe ou un schizophrène qui s’imagine psychopathe. À l’abri dans son appartement hors de prix, au milieu de ses gadgets dernier cri et de ses meubles en matériaux précieux, il tue, décapite, égorge, viole. Sa haine des animaux, des pauvres, des étrangers, des homosexuels et des femmes est illimitée et son humour froid est la seule trace d’humanité que l’on puisse lui trouver.

Pourquoi ce livre est important :

Vous allez détester ce livre. Vous risquez de ne pas le finir. De passer à côté. On préfère vous prévenir... Ce roman n’est pas un polar. Ou alors un OVNI du polar. Et pourtant, ce livre est majeur car il va influencer pour longtemps la vision d’un certain type de serial killer. Et dépasse même de loin cette seule thématique. American Psycho est un livre à part pour son style totalement nihiliste, sa description d’une génération déchue, par ses influences littéraires et sa portée.

Son style tout d’abord : attendez-vous dans un premier temps à de longues et fastidieuses description d’habits, de restaurants, de femmes, toutes « luxueuses » : car oui, tout est présenté comme ayant une valeur dans le monde de Bateman, sauf peut-être le respect et la vie d’autrui. C’est un nihiliste sans sentiments ou presque. La réalité ensuite : elle est mouvante chez Easton Ellis, on ne sait jamais si on parle du réel ou de fantasmes. La folie crescendo de Bateman, ses pulsions destructrices sont de plus en plus entremêlées d’incohérences et d’hallucinations. Tout fait sens dans le roman, l’écriture brute et sans concession tout comme cette scène finale où Bateman voit l’indication « sans issue »...

American Psycho, c’est aussi le roman de la décadence de la « génération X », celle née après le baby boom. Easton Ellis est un moraliste qui traque les failles de cette génération, la sienne, qu’il considère comme dépravée, vaine et assumant de l’être, qui ne jure que par le fric, le pouvoir qu’il procure et l’amusement. Une génération perdue, matérialiste et sans idéaux, déshumanisée dans ses rapports sociaux, complexée de manière chronique et où chacun n’est obnubilé que par ses propres codes. N’ayant pas eu à se battre pour la liberté, ayant toujours connu le confort mais déstabilisée par la tension de la guerre froide et une économie en crise du fait des chocs pétroliers, elle est devenue égoïste et obnubilée par la réussite sociale...

Enfin, American Psycho est un livre qui se nourrit de plusieurs courant et références littéraires, puis invente ses propres codes, devenant ainsi l’un des romans incontournables de son époque. D’inspiration réaliste et « naturaliste », Easton Ellis décrit, à la manière d’un Balzac, minutieusement scènes et détails pour nous en donner une vue complète ; il n’hésite pas à prendre le point de vue froid et psychotique de son personnage principal, de faire sienne son obsession pour les marques et les signes extérieurs de richesse, la vision méthodique et égocentrique de son environnement. Il réinvente à sa manière le mythe du Dr Jekyll, devenu Mr Hyde la nuit venue.

Ce roman est aussi terriblement moderne, transgressif, point de ralliement de plusieurs influences : certains font d’Easton Ellis l’héritier de J.D. Sallinger, d’autres affirment qu’il est avec Chuck Pahlaniuk le sommet littéraire de sa génération désenchantée, celui qui fait la synthèse entre la beat generation (en s’y opposant largement) et le slatterpunk (cf. notre chronique n°9 sur les tueurs en série). On pourrait dire aussi que c’est Houellebecq et Beigbeider tout en un. Il ne cesse par ailleurs de citer un des chefs-d’œuvre de la littérature française, Les Misérables et l’on devine en creux qu’il considère avec ironie sa génération comme celle des nouveaux misérables. Mais ne nous y trompons pas : le titre est un hommage au Psycho de Robert Bloch (cf. notre chronique n°5 sur les serial killers), et insiste sur sa dimension purement américaine, paroxysme et précurseur du sort de l’Occident.

Ce qu’il faut retenir (pour briller en société) :

1. En raison du caractère scandaleux de ce roman, son éditeur américain Simon & Schuster a préféré renoncer à sa publication (et à une avance de 300 000 dollars !). Publié par un autre éditeur, et sûrement en partie en raison du scandale, le livre se vendit à des millions d’exemplaires aux États-Unis...

2. Les œuvres de Bret Easton Ellis ont déjà été adaptées 4 fois, notamment ses romans Moins que zéro (en 1987), Les lois de l’attraction (en 2002) où apparaît pour la première fois un personnage nommé Bateman et bien sûr American Psycho, en 2000, réalisé par Mary Harron, où Patrick Bateman est joué par l’acteur Christian Bale.

3. Les romans de Easton Ellis font se croiser lieux et personnages. Sean Bateman, héros des Lois de l’attraction est ainsi le frère de Patrick, le « héros » d’American Psycho, qui y apparaît brièvement ainsi que dans Glamorama. Le héros de ce dernier roman était un personnage secondaire des Lois de l’attraction, roman dans lequel, durant l’un des chapitres, le narrateur est le personnage principal... du roman Moins que zéro. Les références croisées et clins d’œil sont nombreux pour qui y prête attention !

4. Si Easton Ellis dézingue à tout va sa génération, n’allez pas croire qu’il considère celle qui suit comme meilleure : selon lui, la génération Y, née à partir des années 1980, est en perdition, passe son temps à geindre et se détruire, est pathologiquement sensible et totalement en dehors des réalités : il la qualifie littéralement de « génération de lopettes » (« Generation Wuss » en VO) !

5. Le grand romancier Pierre Lemaître, bien connu désormais pour son livre goncourisé Au-revoir là-haut, s’est d’abord fait connaître avec ses polars. Dans Travail soigné, le commandant Camille Verhoeven utilise un double meurtre de prostituées de Bateman comme source de son enquête.

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