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L’interrogatoire de Ronald Lavallée

Bepolar : Comment est née votre roman Tous des loups ? Et plus généralement, comment naissent vos histoires ? A quel moment vous vous dites que vous en feriez bien un roman ?
Ronald Lavallée : Je m’en étonne moi-même, mais quand j’étais enfant, tous les petits gars de l’Ouest canadien rêvaient d’entrer à la Gendarmerie royale – la fameuse police montée des cartes postales -, qui a perdu du lustre depuis. À l’époque, on devenait gendarme avec 8 années de scolarité et, pour mes petits copains qui rêvaient d’échapper à l’école et aux vaches, c’était bien tentant. La GRC, pour nous, c’était le prestige : l’uniforme écarlate, les chevaux magnifiques (qui en réalité ne servaient plus qu’à la parade), le vœu de ne pas se marier pendant 5 ans et la retraite à 43 ans. Enfants, on savait déjà tout ça ! Bien des années plus tard, comme reporter à Radio-Canada, j’ai rencontré de ces jeunes policiers dans des bleds perdus du Nord, isolés, largement désœuvrés, et tenus à distance par les populations autochtones dont ils avaient supposément « la garde ». Je ne peux pas dire que je les ai enviés…
Voilà. C’est la genèse de Tous des loups. Toutes nos histoires, je suppose, découlent des souvenirs de jeunesse. Celle-ci est revenue me hanter cinquante ans plus tard.
Quand faut-il commencer à écrire ? Quand vous vous réveillez la nuit et que les dialogues sont déjà engagés dans votre tête. Sans rire.

Bepolar :On se trouve dans un village isolé dans le Nord canadien. Est-ce que les endroits sont importants pour vous pour y écrire vos histoires ?
Ronald Lavallée : Mes récits se déroulent dans des milieux naturels, dans les plaines de l’Ouest, la forêt boréale, ou les champs du Québec. Mes personnages ne cherchent pas à se « mesurer » à la nature – cette posture me semble dépassée, la nature étant toujours perdante — mais je continue à croire que les êtres qui vivent au contact de la nature, en milieu dépeuplé, ont des personnalités plus affirmées, plus authentiques que les pauvres banlieusards soumis au rouleau compresseur de la vie urbaine. Cela dit, je vis en banlieue !

Bepolar :Et quel lien avez-vous avec le Nord du Canada ?
Ronald Lavallée : Celui de la plupart des Canadiens. L’histoire se déroule dans ce que nous appelons le Moyen Nord, à quelques heures de nos grandes villes. J’y ai vécu, j’y fais du canot et du kayak. Ce n’est pas la toundra. Très peu de Canadiens se rendent dans l’Arctique : c’est hors de prix. Les parages décrits dans le roman se rejoignent facilement, aujourd’hui, par hydravion ou chemin forestier.
Pour le reste, sachez que la plupart de nos concitoyens ont horreur du grand Nord qui représente pour eux un vide assommant farci de moustiques. Les immenses feux de forêt de cet été n’ont pas dérangé grand’monde. Consternant, mais vrai.

Bepolar :On suit Matthew Callwood, un tout jeune policier. Qui est-il ? Comment le voyez-vous, vous son auteur ?
Ronald Lavallée : Matthew Callwood est un jeune homme d’un milieu aisé, anglophone, dans un Canada très étroitement intégré à l’Empire britannique. Il est imbu des valeurs et préjugés de son époque. Son attitude envers les Autochtones et les fils d’immigrants sous ses ordres est celle qui prévalait en 1914. Callwood veut être juste, il a la bonté naturelle d’un homme qui n’a manqué de rien. Mais il est de son temps. Ce n’est pas un raciste. C’est un impérialiste. Il en est fier, comme tous les Canadiens de l’époque. Je ne crois pas aux personnages qui ont cent ans d’avance sur leur temps ou qui expriment des pensées qui ne circulaient pas de leur vivant. Nous naissons formatés.

Bepolar :Il y a de l’histoire, mais aussi des infos sur les populations autochtones. On pourrait presque dire que c’est aussi un polar social, sociétal. Vous vouliez que ce soit plus qu’une enquête ?
Ronald Lavallée : Pas spécialement, mais on n’échappe pas au contexte. Les médias du monde entier se sont enflammés, l’an dernier, quand on a annoncé la découverte de cimetières d’écoliers indigènes. En fin de compte, il s’agirait de cimetières paroissiaux ordinaires. Reste que le gouvernement fédéral a bien retiré 150 000 enfants de leurs familles, sur un siècle et demi, pour les enfermer dans des pensionnats et les « civiliser ». Il est bon de se rappeler que cette mesure n’a suscité aucune discussion dans la société d’alors, que personne ne s’y est opposé, sauf à trouver que les pensionnats coûtaient trop cher. Partant, on a rogné sur la nourriture et les soins.
On naît formaté. On naît aussi avec une certaine histoire nationale qu’il faut bien endosser.

Bepolar :Il est sorti il y a quelques semaines ? Comment vivez-vous ce moment où il est dans les mains désormais des lecteurs et lectrices ?
Ronald Lavallée : En fait, Tous des loups est sorti il y a un an. Les réactions sont positives. Cela dit, le Canada n’est pas la France. Nous ne sommes pas un peuple littéraire. On ne me court pas après dans la rue ! Tout de même, dimanche dernier le village de Saint-Pacôme dans le Bas-St-Laurent m’a décerné le grand prix du polar du Québec. Très sympathique.

Bepolar :Quels sont vos projets ? Sur quoi travaillez-vous ?
Ronald Lavallée : Je planche sur une nouvelle enquête du policier réticent et pas autrement convaincu qu’est Matthew Callwood. Je m’amuse beaucoup en sa compagnie. Nous allons peut-être faire un bout de chemin ensemble. Tant qu’il me parle la nuit…

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