Le 22 août 2023
- Réalisateur : Hyoe Yamamoto
- Distributeur : Netflix
- Nationalité : Américaine, Japonaise
- Date de sortie : 26 juillet 2023
- Durée : 1h40min
Le documentaire de Netflix sur l’affaire Lucie Blackman est sérieux et précis. Mais il lui manque le recul pour interroger, au-delà d’un assassinat, les dangers auxquels une société expose les femmes dans des univers nocturnes.
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Résumé :
Le 1er juillet 2000, Lucie Blackman, une jeune Britannique de 21 ans, disparaît à Tokyo, déclenchant une enquête internationale et une inlassable quête de justice.
Fidèle au true crime qui a assuré une partie de son succès, Netflix revient sur l’affaire Lucie Blackman, cette jeune Britannique assassinée au Japon en 2000. Le documentaire retrace le parcours de cette femme, à partir de son arrivée à Tokyo jusqu’à sa disparition, évoque son travail dans un club d’hôtesse et sa rencontre fatale avec Joji Obara, homme d’affaires et tueur en série, un profil plutôt rare dans l’histoire du fait divers.
Le film donne également la parole au père de la victime, aux enquêteurs et aux journalistes impliqués dans cet événement, privilégiant un dispositif classique du true crime : les interviews alternent avec les images d’époque, la chronologie des faits fonctionne selon des effets d’attente. Si le documentaire n’innove donc pas d’un point de vue formel, il fournit des éléments très intéressants sur la manière dont la police japonaise a mené l’enquête, privilégiant de minutieuses et patientes investigations à une communication tous azimuts, tandis que le père de Lucie, dans une démarche tout à fait légitime, l’angoissant se mêlant à l’impatience, ne cessait de solliciter les médias pour aboutir à la vérité, déployant une énergie à la hauteur de son désarroi. Sa persévérance le conduit même à solliciter l’intervention de Tony Blair, alors Premier ministre anglais, en visite au Japon au cours du mois de juillet 2000.
Parallèlement, le récit des circonstances du drame esquisse en creux le portrait d’un Tokyo à la fois multiple et labyrinthique, où les rêves d’expériences de la jeune Lucie se sont fracassés sur une rencontre vespérale, celle d’un psychopathe.
Mais on note que d’autres hôtesses comme la jeune Anglaise, ont croisé la route de l’assassin, ce qui pose une question plus structurelle sur les violences auxquelles une société peut exposer les femmes, dès lors que dans le cadre d’activités nocturnes tarifées la loi autorise qu’elles soient au service des hommes, même s’il ne s’agit pas de prostitution. On aurait aimé qu’au-delà d’un crime le documentaire prenne plus de recul pour interroger cette réalité qui explique bien des faits divers, où on ne peut exclure les effets de la domination masculine, légitimée par une communauté, dans des corps aux pulsions morbides.