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Petite histoire du polar au cinéma, épisode 7 – les tueurs en série

En réaction à la déliquescence du gangster au cinéma, devenu personnage de tragédie et en lequel le public peine après les années 1930 à s’identifier, le serial killer vient redonner corps au besoin cathartique de violence du tout venant. À mesure que la psychanalyse s’immisce dans les intrigues populaires, l’on passe du constat d’une société viciée par la corruption à ses effets pathologiques sur le peuple : ainsi, le mal s’incarnerait parmi le commun des mortels, petites gens ou petits-bourgeois broyés par le système et transformés en tueurs psychopathes. Pour autant, les cinéastes adoptent petit à petit une posture moins simpliste : hormis quelques cas isolés de dégénérés, le mal absolu naîtrait de manière aléatoire et sans raison précise.

Si les mythes autour de Jack l’Éventreur ou Ted Bundy normalisent les tueurs de masse, il faut attendre les présidences de Ronald Reagan et George Bush avant de voir se banaliser totalement le terme de "serial killer". Au lendemain de la contestation politique des années 70, le tueur en série devient le sujet idéal pour occuper les foules et tenir l’opinion éloignée des véritables questions. C’est la période où la littérature, le FBI et le septième art mettent au point des stéréotypes pseudo-scientifiques permettant de le caractériser. Au même titre que la femme fatale joue sur l’Eros, le serial killer se veut alors chez le spectateur la manifestation d’une passion refoulée pour la mort.

Des tueurs sous l’emprise de leurs pulsions

Dans l’histoire du cinéma, apparaissent dans un premier temps les assassins compulsifs hantés par une pulsion inconsciente : en 1931 le tueur en série de M. le Maudit de Fritz Lang – seul avec Hitchcock à avoir autant influencé le polar -, chez Hitchcock justement en 1943 celui de L’Ombre d’un doute, en 1960 celui de Psychose ou en 1971 celui de Frenzy. L’on pourrait aussi ajouter Le Voyeur (Michael Powell, 1960), L’assassin sans visage (Richard Fleischer, 1949), le stupéfiant meurtrier incarné par Tony Curtis dans L’Étrangleur de Boston (1967) du même Fleischer, ou ceux de Tueurs nés (Oliver Stone, 1994). Autant d’exemples qu’il faut rapprocher de tueurs en série historiques, à l’instar d’Ed Gein – base du personnage de Norman Bates dans Psychose, mais aussi de Leatherface dans Massacre à la tronçonneuse -, Jeffrey Dahmer ou encore Henry Lee Lucas, à l’origine du film Henry, portrait d’un serial killer (1991) de John McNaughton. Dans Le Juge et l’Assassin (Bertrand Tavernier, 1976), se glisse au-delà de la folie du meurtrier - non reconnue comme telle - un critique du point de vue selon lequel la bourgeoisie est menacée par une justice de classe. Remarquons que pour Fritz Lang, la société américaine toute entière se fonde sur la compétition et le crime. Ce qu’il affirme dès 1956 dans La cinquième victime.

Les assassins pragmatiques

D’autres tueurs au cinéma inscrivent au contraire leur trajectoire mortifère de manière plus raisonnée, comme en 1946 le Monsieur Verdoux de Charles Chaplin qui, pour subvenir aux besoins de sa famille, en passe par le meurtre – Landru de Claude Chabrol reprendra cette ligne. Même dynamique dans La mariée était en noir (François Truffaut, 1967), où Jeanne Moreau tue pour venger la mort de son époux, et dans Un frisson dans la nuit (Clint Eastwood, 1971) où les assassinats vise à réparer un viol. À noter qu’en adaptant Jean-Christophe Grangé en 1999 avec Les Rivières pourpres, Mathieu Kassovitz reproduira presque le même schéma.

Quelques exemples à part, avec un tueur tantôt conscient de ses actes, tantôt dominé par ses pulsions, voient toutefois le jour, comme en 1982 Les fantômes du chapelier, d’après Simenon, de Claude Chabrol, ou dans le lacunaire Element of Crime de Lars Von Trier (1984). Chabrol, pour métaphoriser la lutte des classes, tournera La Cérémonie en 1995, s’appuyant sur le roman L’Analphabète de Ruth Rendell et le fait-divers des sœurs Papin, qui assassinèrent leurs patronnes.

Hagiographie des tueurs en série

Dès la fin des années 1980, le serial killer devient aussi adulé que l’était le gangster au début des années 1930. En plus d’être conscient, le désir de mort devient chez lui existentiel, comme le personnage tiré des romans de Thomas Harris, Hannibal Lecter, dans Le sixième sens (Michael Mann, 1986), Le Silence des Agneaux (Jonathan Demme, 1991), Hannibal (Ridley Scott, 2000) et Dragon Rouge (Brett Ratner, 2002). Qu’importe les tentatives de compréhension de son comportement par l’agent du FBI Clarence Starling, l’"Éventreur de Cheasapeake" y oppose une vision du mal dépourvue de toute rationalité. L’apologie du serial killer va jusqu’à faire de Lecter une véritable icône de la pop-culture, renchérie dans Hannibal via sa passion pour la Renaissance italienne et la littérature. Apologie qui trouve son point d’orgue macabre en 2000 dans American Psycho, de Mary Harron et d’après Bret Easton Ellis. Où Patrick Bateman, homme d’affaires à l’ombre de tout soupçon, commet les pires horreurs sans jamais attirer l’attention. Scream (Wes Craven, 1997), de la même manière, induit une forme d’empathie étrange avec les tueurs, articulant leurs atrocités comme le moyen de dépasser la normalité de leur existence.

David Fincher à lui tout seul aura joué un rôle considérable à travers ce sous-genre en réalisant en 1995 le film Seven, puis Zodiac en 2007. Deux œuvres fondatrices du thriller moderne où le serial-killer, en empruntant un chemin de traverse mental que personne ne peut comprendre sinon lui, brise les stratégies des enquêteurs les plus retors. Clint Eastwood, 31 ans après Un frisson dans la nuit, tourne en 2001 Créance de sang, et contrecarre quelque peu cette noirceur avec une traque nettement plus optimiste. Avant que Tim Burton ne mette en scène en 2007 l’œuvre la plus tourmentée de sa carrière : Sweeney Todd, le diabolique barbier de Fleet Street, comédie musicale mâtinée de drame social avec un tueur en série radical réclamant sa vengeance.

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