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Ourika : que vaut la série de Booba sur le narcotrafic ?

De : Clément Godart, Élie Yaffa
Avec : Adam Nessa, Noham Edje, Salim Kechiouche
Genre : suspense, action, drame
Pays : France
Année : 2023

Driss, étudiant émérite, se voit contraint de reprendre les rênes d’un réseau de trafic de
cannabis. Il se trouve bientôt piégé dans une spirale infernale…

En choisissant d’ancrer son intrigue durant les violences urbaines de 2005 initiées à Clichy-sous-Bois, "Ourika" brouille d’abord les pistes quant à ses intentions. Son focus vise-t-il à offrir, au creux de la fiction de divertissement, un regard sociologique, historique ou politique ? S’agit-t-il de faire écho à la constance du phénomène de société qu’est l’émeute urbaine pour rappeler l’impuissance et l’abandon des institutions en la matière ? Cela ne fait aucun doute en filigrane, le motif de la banlieue – ici en partie vidé de ses stéréotypes et idées reçues, par-delà toute sublimation – servant manifestement dans "Ourika" à exhumer une problématique sociale qu’aucune politique publique de prévention ou d’accompagnement n’a réussi à comprendre au fil des décennies. La série prend donc en un sens à sa façon le relais sur tout un champ du cinéma, de "La Haine" (Mathieu Kassovitz, 1995) aux "Misérables" (Ladj Ly, 2019) en passant par "L’Esquive" (Abdellatif Kechiche, 2003), "Entre les murs" (Laurent Cantet, 2008), "Bande de filles" (Céline Sciamma, 2014), "Dheepan" (Jacques Audiard, 2015), ou encore "Shéhérazade" (Jean-Bernard Marlin, 2018). Cet attachement patiemment surligné dans le premier épisode, notamment au gré d’une scène de surveillance policière (le méchoui) déconstruisant les poncifs autour du banditisme, s’étiole pourtant assez vite.

Rapidement malmenée à travers de multiples péripéties, la trajectoire des protagonistes frise l’emballement. La toile de fond des banlieues fiévreuses, supplantée entre autres par la vallée de l’Ourika au Maroc, se dissipe bientôt au profit d’un affrontement latent et concurrentiel entre barons de la drogue. Si le propos d’"Ourika" aborde bien foncièrement la fatalité du déterminisme social et l’écueil de l’intégration, les périls auxquels font face les personnages principaux – Driss l’étudiant vertueux, William le flic idéaliste et arriviste… – l’emportent sur le reste. Ne comptent alors que les complications et revirements de situation, aux frontières du polar, du suspense et de l’action. Si bien que l’ambition nonchalamment politique d’"Ourika" perd soudainement de sa consistance. Densité d’écriture qu’elle ne retrouvera qu’à la marge et dans une autre dynamique, par exemple pour souligner l’immoralité de certaines décisions des pouvoirs publics dans le cadre de la guerre antidrogue. Ainsi peu à peu délestée de sa tonalité sociale et corrosive, la série imaginée notamment par le rappeur et producteur Booba (aux côtés de Clément Godart) privilégie un divertissement ténébreux. À la manière d’un film noir, le devenir des personnages devient de plus en plus tortueux et incertain. Comme si le schéma du scénario, après avoir d’abord envisagé sa matrice comme un tableau social pessimiste, prenait petit à petit la forme d’une descente aux Enfers.

Dans cette série à suspense aux enjeux et figures finalement attendues, les ingrédients propices à la distraction – qualité de jeu des acteurs, sens du rythme, rebondissements, musique, photographie – ne manquent pas de sel. Sans déchainer les passions mais tout en maintenant habilement l’attention, "Ourika" réussit à installer une atmosphère assez soignée et à esquisser des personnages aux destins crédibles. Seule une fâcheuse tendance, heureusement sporadique, à la violence gratuite (scènes de torture, le plus souvent) fait quelquefois perdre à la série en justesse et en équilibre. Reste qu’"Ourika", en plus de distiller une ambiance crépusculaire élégante et d’égrainer des gueules cassées impayables, sait parfois se montrer diablement explosive. Aucune révolution à l’horizon, mais une série à la "Engrenages" bien supérieure à la moyenne.

"Ourika" est disponible sur Prime Video.

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