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#Mafia : « La forme de l’eau » et les enquêtes du commissaire Montalbano d’Andrea Camilleri

N°16 au palmarès des meilleurs livres du crime organisé selon BePolar

On peut être un auteur d’importance sur la mafia sans s’y référer directement dans ses ouvrages : c’est le cas du romancier sicilien Andrea Camilleri qui nous parle constamment de Cosa Nostra sans que cela ne soit jamais réellement son sujet principal. Dans La Forme de l’eau et les autres aventures du mythique commissaire Montalbano, on plonge avec délice à la découverte de cet environnement sicilien, creuset de la mafia mais qui ne se limite pas, loin s’en faut, à elle.

L’histoire :

La Forme de l’eau
A Vigàta, Sicile orientale, pour s’en passer, il s’en passe des choses au Bercail, mi-terrain vague, mi-décharge publique, hanté par les couples en mal de sensations fortes, où dealers et prostituées font leurs petites affaires. Un type qui trépasse entre les bras de sa dulcinée d’un moment, ce n’est pas monnaie courante mais ça arrive. Mais lorsque le type s’appelle Luparello et que c’est le parrain politique local, tout le monde s’affole. La Mafia, les politiques, les autorités religieuses... Seul le commissaire Montalbano, un homme bourru, flegmatique et terriblement "sicilien", garde son sang-froid, habitué qu’il est à louvoyer dans des zones grises et glauques où la loi et son contraire ont tissé des liens étroits...

Chien de faïence
Tano u grecu, important mafieux menacé par ses pairs, décide de se livrer au commissaire Montalbano, mais il est abattu par ses anciens complices en même temps que deux policiers. Avant de mourir, il a révélé l’existence d’une importante cache d’armes dans une grotte aux environs de Vigàta. Bientôt le cadavre d’un employé municipal vient s’ajouter à la liste. L’affaire ne s’arrête pas là : dans l’arrière-fond de la grotte, on trouve les corps de deux amants s’étreignant dans la mort. Touchant ! Troublant, surtout, ce chien de faïence qui semble monter la garde devant les défunts.

L’Excursion à Tindari
Chaque nouvelle enquête sur un crime attise un peu plus la mélancolie du commissaire Montalbano. Ici, le meurtre d’un couple de vieillards de Vigàta le trouble plus qu’il ne le voudrait. Existe-t-il un lien avec cette autre affaire, l’exécution d’un jeune don juan de village ? Pour découvrir la vérité, rien de tel que de longues méditations sous son olivier centenaire, de savoureux déjeuners en compagnie d’un fort joli témoin, et le soutien inconditionnel de son équipe. Reste une question de taille : se résoudra-t-il enfin à épouser Livia, sa fiancée génoise ?

Pourquoi ce livre est important :

Avant d’être des romans de mafia, les livres de Camilleri sont un portrait vivant et amoureux (mais passionné ET raisonné) de la Sicile. Si Cosa Nostra n’est jamais loin dans les enquêtes du fameux commissaire Salvo Montalbano, c’est que là-bas elle est à la fois le quotidien des petites embrouilles et la puissante organisation en collusion avec tous les pouvoirs (politiques, économiques, judiciaires). Gourmet et un peu désabusé, Montalbano ne dit pas autre chose : en Sicile comme ailleurs, « la vérité coïncide rarement avec la justice », la combinazione n’est jamais loin.

Car si la mafia vient bien de Sicile la Sicile n’est pas la mafia : Camilleri a fait aimer à des millions d’Italiens et bien au-delà de ses frontières sa gastronomie, ses coutumes et sa langue, si typique et si différente de l’italien « national », dont les origines se trouvent davantage à Florence. Le dialecte sicilien est plein d’inventions, riche de formulations particulières qui ne sont pas sans poser des casses-têtes aux traducteurs ; selon lui il est la « langue du sentiment » quand l’italien est la langue du concept et de la raison.

N’allez pourtant pas croire que Camilleri dresse un portrait idyllique de sa Sicile : il en connaît sûrement mieux que d’autres l’emprise de Cosa Nostra, il refuse seulement d’en faire son personnage principal, dans une forme de résistance. Car les méfaits de la mafia sont sans cesse dénoncés, comme ceux de tous les autres formes de pouvoir abusifs.

Au fil des aventures du commissaire Montalbano, on suit l’évolution de « la pieuvre », une organisation en mouvement constant, extrêmement centralisée et très souple, qui change, comme l’eau, continuellement de forme. Une mafia qui est passée de la coppola (la casquette traditionnelle sicilienne) et de la lupara (un fusil de chasse à canon scié) à la mafia embourgeoisée des adjudications truquées de travaux publics puis à la mafia moderne en col blanc, mondialisée et informatisée.

Les mafiosi n’ont même plus la prétention de se présenter comme des uomini d’onore, car ils ne respectent plus les codes qu’ils avaient eux-mêmes fixés.
Camilleri refuse de faire des mafieux des personnages centraux de ses romans, ce qui leur donnerait une certaine noblesse.

Il a par contre écrit un passionnant livre, Vous ne savez pas où il dresse un abécédaire de la mafia d’après les pizzini (billets de papier adressés à ses hommes de confiance par peur des écoutes sur les portables) de l’ancien capo dei capi Bernardo Provenzano, présenté comme un homme seul et ne pouvant profiter de sa richesse, vivant parmi des baraques isolées dans la campagne italienne. Un monde d’archaïsme (entre superstitions et force brute) dont la fascination est celle des passions primaires. Selon lui, « les meilleurs écrivains sur la Mafia sont les policiers, les carabiniers et les juges ».

Enfin, si les enquêtes de Camilleri méritent d’être lues, c’est pour son univers romanesque inspiré du réel et pour son personnage principal, le commissaire Montalbano. On serait tenté de faire de Camilleri le Vargas italien, lui l’écrivain du sensible qui fait du polar, avec son personnage si attachant. Montalbano est en effet l’un des policiers les plus attachants du genre, profondément humain, mais aussi humaniste. Capable de bienveillance et d’empathie, résigné parfois par le contexte sicilien, il n’en dénonce pas moins lâchetés, bassesses et compromissions. Comme pour Vargas, la galerie des personnages secondaires est vivante et haute en couleurs, dévouée et méfiante envers ce commissaire qui ne navigue pas dans les courants marins habituels et pourtant si loin des eaux troubles.

Ce qu’il faut retenir (pour briller en société) :

1. On mesure mal en France le succès de Camilleri : traduit en trente langues, il aurait vendu au bas mot 26 millions d’exemplaires dans son pays d’origine. Cet auteur populaire ne transige pas avec l’exigence : il a par exemple remporté en 1947 le prix de poésie Libera Stampa devant un certain Pasolini et a longtemps refusé d’écrire des romans, pourtant encouragé par un prestigieux ami, l’écrivain sicilien Leonardo Sciascia.

2. Le commissaire Montalbano tire son nom de l’admiration portée par Camilleri à l’auteur catalan de romans policiers Manuel Vázquez Montalbán, le créateur du personnage de Pepe Carvalho, un autre enquêteur fin gourmet.

3. La plupart des enquêtes de Montalbano mettent en effet en avant la gastronomie sicilienne. Lire ces livres, c’est aussi découvrir les arancini (boulettes de riz frit fourrés de différents ingrédients), les pasta ‘ncasciata (sorte de pâtes de type macaroni composé de tomates, de fromage local, de viande hachée, de salami, d’œuf dur, d’aubergines, de pecorino, d’ail, vin blanc, huile, basilic !) ou de nombreux plats de poisson ou de fruits de mer cuisinés en Trinacrie (nom grec de la Sicile).

4. La Forme de l’eau a reçu le prix Mystère de la critique en 1999, l’un des plus anciens prix littéraires français récompensant des polars et surtout très souvent gage de très grande qualité.

Galerie photos

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