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L’interrogatoire de Sandrine Collette pour Ces orages là

Bepolar : Comment est née l’idée de ce roman ?
Sandrine Collette : Elle est née il y a un moment mais comme il arrive parfois, je ne trouvais pas l’angle d’attaque. C’est une histoire qui mûrissait dans un coin de ma tête (ou qui pourrissait, parce que cela peut aussi finir de cette façon : ça ne donne rien) en attendant que quelque chose la sauve. Autrement dit, il me fallait un déclencheur à ce roman qui était davantage ciblé sur l’attente, un thème qui me passionne. Et puis vient le 1er confinement de mars 2020 et l’explosion des violences intrafamiliales : cela a sans doute été le déclic, celui qui m’a fait changer l’approche de ce livre. Pas un roman sur l’attente mais un roman sur l’emprise et avant tout sur la reconstruction : sa possibilité, le prix à payer.

Bepolar : C’est un livre qui raconte l’histoire de Clémence qui a fui trois ans de relation conjugale toxique, même si les choses ne sont pas encore gagnée. Qu’est-ce qui vous a intéressé dans ce sujet des violences conjugales ? Qu’aviez-vous envie de dire ou de faire ?
Sandrine Collette : Je n’avais pas envie de suivre le schéma classique de la jeune femme prise dans une relation toxique, c’est-à-dire sa lutte pour s’en sortir avec un joli final où elle arrive à s’enfuir. Non, ce qui m’intéresse, c’est le moment où cette femme-là cesse d’intéresser ses amis ou la police, à savoir quand elle est déjà partie. Parce qu’on croit alors que tout est bien qui finit bien, mais le départ (ou la fuite) n’est que le début de l’histoire. Quand un manipulateur a pris toute la place dans votre vie, le quitter, c’est s’exposer à la solitude absolue. Et parfois il est encore plus difficile d’y faire face que de subir l’emprise psychologique qui a précédé. C’est le combat de Clémence : non pas quitter Thomas (elle l’a fait) mais savoir si elle peut tenir sans lui.

Bepolar : Parlez nous de Clémence, votre héroïne. Comment la voyez-vous ?
Sandrine Collette : C’est une petite boulangère de trente ans. Je dis "petite" comme on dit une petite souris : toute menue toute maigre, timide, en un mot : avec un profil idéal pour Thomas. Un manipulateur ne s’attaque pas à n’importe qui, il a un flair incroyable pour repérer les gens avec des fragilités, des faiblesses, qui viennent presque toujours de l’enfance. Cela peut sembler n’être pas grand-chose mais il suffit d’une faille. Clémence est ainsi. Comme presque tout le monde. Clémence, c’est nous.

Bepolar : On est véritablement dans la tête de Clémence. Vous souhaitiez que les lecteurs et lectrices soient au plus près d’elle ?
Sandrine Collette : Ce qui m’importe avant tout, c’est l’atmosphère du roman et l’émotion qui transparaît à la lecture. Il m’a semblé que cette toute petite histoire, intime, intérieure, deviendrait immense si j’arrivais à emmener le lecteur avec moi dans la tête de Clémence, dans sa tête et dans son corps, pour ressentir la peur, le désespoir, la culpabilité, le chagrin, la colère, tout ce qui se mélange et forme un grand chaos incontrôlable. L’idée est que l’expérience vécue par Clémence a rompu les digues : en elle, tout semble impossible mais tout peut arriver, il n’y a plus de maîtrise. La rationalité s’est évanouie. Ce qui reste, c’est l’instinct dans ce qu’il a de plus pur mais aussi de plus primaire, de plus brut. Je crois que nous avons tous, de près ou de loin, vécu quelque chose qui nous rappelle ce que ressent Clémence. En ce sens, nous sommes dans une proximité dérangeante avec elle.

Bepolar : Elle s’installe dans une nouvelle maison que vous décrivez très bien, petite et laide mais avec un jardin grand comme le monde. Quel est l’importance des lieux quand vous racontez une histoire ? Quelle place a cette maison, pourquoi l’avez-vous imaginée ainsi ?
Sandrine Collette : Les lieux sont primordiaux. Pour moi, il n’y a pas de vie qui se tienne dans un lieu sans que celui-ci influence cette existence en retour. En d’autres mots, le lieu contamine ses habitants - en bien ou en mal, en force ou en faiblesse - ou a minima est un reflet de quelque chose. Clémence ressemble à cette maison abîmée. Là encore, le processus de reconstruction est en jeu, pour l’une comme pour l’autre. Mais le lieu le plus important est cet étrange jardin, dont on comprend très vite qu’il est à la fois un possible chemin de rédemption et la focalisation des ténèbres et de l’impuissance. C’est comme entrer dans un conte, dans une forêt la nuit : tous les horizons sont ouverts mais le danger plane en parallèle. Le basculement de l’histoire, c’est de savoir de quel côté on bascule. Dans une forêt, on peut trouver un trésor ou se perdre à jamais.

Bepolar : Est-ce que ce livre a une forme d’engagement, de dénonciation pour vous ?
Sandrine Collette : Non, mais je comprends qu’on puisse le lire de cette façon. Pour moi, ce livre est avant tout un livre de survie, un livre de renaissance. Mais comme après une catastrophe, tout ne peut pas recommencer comme avant. Certaines choses ont été irrémédiablement abîmées et la personne sortie du cataclysme a été changée elle aussi par ce qu’elle vient de vivre. C’est un peu comme si on perdait une jambe dans un accident et qu’on veuille continuer à faire de la course à pied comme avant. Clémence est cette accidentée-là, même si le drame a été fondamentalement psychologique. Je ne dénonce rien, je regarde la façon dont elle lutte, ses tentatives émouvantes, ses avancées, ses reculs, tout ce qu’elle arrive à convoquer pour essayer de s’en sortir et tout ce qui échoue, exactement comme dans la "vraie vie". Car l’histoire de Clémence n’est pas seulement un roman, c’est une histoire vraie.

Bepolar : Quels sont vos projets désormais ? Sur quoi travaillez-vous ?
Sandrine Collette : Continuer à écrire ! C’est ma respiration, mon souffle. L’écriture est une expérience unique. Quand on arrive à exprimer exactement ce qu’on a dans la tête avec des mots, il y a une joie immense, peut-être comme quand un artiste peint un tableau qui correspond absolument à ce qu’il voulait faire. Et tout cela est infini - tant que l’imagination est là.

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