Le nouveau roman d’Anouk Shutterberg nous emmène dans les Alpes. L’occasion de lui poser quelques questions...
Bepolar : Comment est née ce nouveau roman ?
Anouk Shutterberg : L’idée de ce nouveau roman, In Extremis a germé alors que j’étais à Valfréjus où je m’essayais à la discipline du speedriding . On était en janvier 2023 en hors saison et la station était quasi vide à l’exception de fans de sports extrême et de saisonniers. Cette station au bout du monde m’a inspirée dans ce côté huis clos à ciel ouvert.
Bepolar : Tout se déroule en Savoie et en montagne. Qu’est-ce qui vous intéresse dans ces territoires ?
Anouk Shutterberg : Comme dans la plupart de mes romans les grands espaces où la nature règne en maître comme la forêt ou les lieux isolés et perdus comme la montagne brute sont parfaitement adéquats pour nouer une intrigue et créer une ambiance anxiogène.
Bepolar : Un tueur rode autour de Valfréjus. On imagine qu’une station, avec ses touristes mais aussi son milieu clos des habitants à l’année est un cadre parfait non ?
Anouk Shutterberg : Oui, cette station Valfréjus se situe au bout du monde et elle est d’ailleurs surnommée le « nid d’aigle » autant vous dire tout un programme (rires). En hors saison, il n’y a qu’une centaine de personnes principalement des perchistes, des saisonniers et des pratiquants de fans de sports extrêmes. Un isolement de lieu et une petite communauté très conviviale où tout le monde se croise et fait la fête le soir. Cette configuration de lieu et de personnages servaient parfaitement l’idée d’un envers du décor plus sombre. Comme à mon habitude j’aime bien passer derrière le rideau et exploiter la nature humaine. Derrière les sourires, un tueur particulièrement pervers et sadique se dissimule. Mais qui est-il ?

Bepolar : En quoi ce milieu de la montagne a influencé votre écriture ? Est-ce qu’il aurait pu se passer ailleurs ce roman ?
Anouk Shutterberg : Oui, la montagne est un véritable décor en noir et blanc pour servir une atmosphère glacée et glaçante. Dans In Extremis, la montagne et la brutalité de ses roches est un véritable personnage qui sert la violence de mon tueur en série. Je ne pouvais imaginer un autre lieu pour servir mon atmosphère sous haute tension et anxiogène.
Bepolar : Vous mettez en scène une journaliste pour mener l’enquête. Est-ce que c’est parce que cela lui donne plus de latitude qu’un policier ?
Anouk Shutterberg : Dans ce nouveau thriller, je voulais mettre en valeur les journalistes d’investigations qui font un véritable travail de recherche et d’enquête. J’ai d’ailleurs à ce titre interviewé plusieurs journalistes police justice qui travaillent autant sur des quotidiens nationaux qu’à la tv. Leur particularité est que, contrairement aux policiers qui ouvrent et ferment des portes et ne s’attachent qu’aux faits, le journaliste peut laisser parler son instinct et ouvrir des portes non encore exploitées par les équipes de police.
Bepolar : Elle s’appelle Axelle. Qui est-elle ? Comment pourriez-vous nous la présenter ?
Anouk Shutterberg : Axelle est à la fois journaliste mais c’est également une tête brûlée. Elle est la cadette d’une fratrie soudée, savoyards depuis plusieurs générations. Comme son frère aîné Paul et la benjamine, Marie, Axelle pratique des sports extrêmement dangereux tels le wingsuit, le basejump des disciplines à très haut taux de mortalité. Et elle reste identique à elle-même dans sa quête de vérité où se mettre en danger ne lui fait pas peur. Je mets en scène une fratrie qui n’a pas froid aux yeux et déterminée dans ses actions.

Bepolar : Vos personnages sont toujours très intéressants. Comment les travaillez-vous ?
Anouk Shutterberg : Je travaille mes personnages en cherchant toujours l’ambivalence.
La particularité de ce thriller est de faire entrer le lecteur dans la tête du psychopathe, personnage central de mon récit. C’était un travail de recherche approfondi sur les ressorts de la psychopathie et ses distorsions. D’ailleurs, dès le premier chapitre je plonge le lecteur dans les confessions de ce tueur, confessions qui viennent ponctuer le roman au fil de l’histoire.
Le personnage qui campe le prédateur psychopathe a une personnalité double. Il est à la fois sadique et cruel mais dotée d’une certaine élégance, une dimension poétique. Il s’excuse de ses actes, comme il le mentionne dans ses confessions « excusez-moi, ce n’est pas ma faute je suis un cœur d’artichaud… » C’est un metteur en scène qui pousse le paroxysme jusqu’à l’esthétisme. Il souhaite que ses dépouilles soient retrouvées intactes, mises en valeur même s’il ne reste que des têtes. Il les prépare, les maquille, les coiffe et leur appose une couronne de fleurs d’edelweiss, l’étoile d’argent la fleur des alpages, symbole de l’amour perdu.
Dans le même registre et avec un travail précis sur les personnalités des autres personnages, la fratrie des Montay Paul, Axelle et Marie campent des sportifs, adeptes de l’extrême. Une quête de défi sportif qui déborde dans leur vie personnelle, sur leurs actes et leur mise en danger.
In Extremis, c’est l’extrême à double niveau, celui des sportifs qui dansent avec la mort et celui de ce tueur sadique qui s’attaque à des proies aguerries et sportives qui pourraient parfaitement renverser la situation lorsqu’il se met en action. Lui aussi est dans cette quête d’adrénaline, de challenge et de défi.
Alterner accalmies et accélérations avec de l’action ou des scènes qui jettent le trouble et l’ambiguïté.
Bepolar : Quels sont vos projets désormais ?
Anouk Shutterberg : Je travaille actuellement sur un nouveau thriller et non un polar. Un one shot. Une histoire machiavélique dans laquelle ceux qui tirent les ficelles d’un stratagème ne sont pas ceux auxquels le lecteur va penser. Un vrai casse-tête bien tordu (rires) mais j’ai ma colonne vertébrale. Rendez-vous je pense en avril 26.
Bepolar : Qu’est-ce qui fait un bon polar ?
Anouk Shutterberg : Une histoire qui tient la route avec des fausses pistes crédibles et des rebondissements inattendus même si tous les indices sont sous les yeux du lecteur. Les changements de rythme aussi.
Pour moi, écrire un polar c’est à la fois mathématique, la résolution d’une équation à plusieurs niveaux mais également savoir donner une dimension symphonique : alterner accalmies et accélérations avec de l’action ou des scènes qui jettent le trouble et l’ambiguïté.
Personnellement je construis mon scénario visuel avec chaque scène. Malheureusement ce serait trop simple s’il n’y avait qu’une seule recette. Une chose qui me tient à cœur reste le dénouement, qui doit être crédible et que le lecteur n’oubliera pas. Je soigne particulièrement mes fins. Elles doivent être à la hauteur de mon récit et surprendre le lecteur. Les meilleurs compliments que mes lecteurs me font c’est : « Je n’ai rien vu venir » « J’ai lu en apnée » ou encore « je n’ai pu décrocher, j’ai dévoré votre livre en deux jours ».
Je suis tellement reconnaissante envers mes lecteurs de plus en plus nombreux et fidèles à mes romans.



































































































































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