Un film d’horreur sur Netflix qui délaisse la période contemporaine, pour se transporter au dix-neuvième siècle ? Pourquoi pas. Surtout lorsque le long métrage se configure comme une sorte de robinsonnade, au sein d’une lande aride, livrée à des vents perpétuels.

Dans une ferme, vivent un couple et leur jeune fils : le père est taiseux et inflexible, la mère aussi rassurante qu’attentive. On devine aisément le personnage qui déchaînera le malheur par le simple récit d’une légende effrayante, celle d’une créature harcelante aux yeux vides, à l’affût de la moindre peur.

Le spectateur connaissait Freddy Kruger, croquemitaine que fait naître le sommeil. En voici l’avatar invisible, issu de nos peurs ancestrales et sans cause, certes plus abstrait qu’un monstre urbain, mais aux conséquences non moins sanguinolentes : ainsi, la première victime est un homme retrouvé dans une barque, le corps salement amoché.

Son destin tragique en appelle évidemment d’autres, même si l’histoire s’affaire à distiller l’angoisse de manière progressive, évoquant les traumatismes liés à des souvenirs de famille douloureux, jouant habilement des ombres et des lumières pour construire une atmosphère inquiétante, tirant partie d’un paysage idoine, où le danger peut surgir à n’importe quel moment.

Le huis clos reconfiguré en attente (celle du père) fait bientôt bifurquer le récit vers une sorte de drame psychologique qui ne perd pourtant jamais de vue ses intentions fantastiques. L’attitude de Lucia, la mère, devient le point nodal de l’histoire, puisqu’il s’agit bien de déterminer si elle est victime d’hallucinations ou lucide dans son pressentiment de l’horreur.

Certes, le film s’alourdit de quelques scènes inutilement spectaculaires ou de gimmicks propres aux films d’horreur, avec un clin d’œil à Shining. Mais Reclus atteint globalement son but : susciter le suspens et le malaise.