N°86 DU TOP 100 DES MEILLEURS THRILLER DE BEPOLAR

Suspense imparable ne choisissant jamais résolument entre réel et fantastique, Incassable distille le mystère jusque dans son twist final, incontournable.
Avec : Bruce Willis, Samuel L. Jackson, Robin Wright
Année : 2000

De quoi ça parle ?

David Dunn, gardien de sécurité à Philadelphie, ressort contre toute attente indemne d’une terrible catastrophe ferroviaire. Troublé par l’accident, cet unique rescapé est sujet à une crise d’identité et cherche à comprendre pourquoi il a survécu. Il rencontre bientôt Elijah Price, un misanthrope à
la tête d’une galerie d’art inspirée des comics et souffrant d’ostéogenèse imparfaite…

C’est culte parce que…

Assistée par la musique hypnotique de James Newton Howard, la mise en scène de Shyamalan sécrète du trouble sans jamais se résoudre aux effets tapageurs. Même si rien d’extraordinaire ne se déroule jamais directement sous nos yeux, la rythmique des scènes en donne cependant un sentiment très fort. Il suffit d’un homme installé dans un wagon, de ce même homme revêtu d’un imper sous la pluie, du regard médusé d’un enfant… pour insinuer le mystère et le saisissement. Les couleurs froides, le cadrage et la photographie d’Eduardo Serra (collaborateur émérite de Claude Chabrol) distillent une sorte d’envoûtement. Un système où le twist et l’étrange –
ingrédients typiques de Shyamalan – font florès.

On notera que la transformation du protagoniste central, qui glisse de la banalité à l’héroïsme, est entièrement contenue dans le regard des enfants – un symbole d’ailleurs présent dans toute la filmographie de Shyamalan. Ainsi, de la petite fille espionnant (avec la tête à l’envers) David entre les sièges dans le train – alors dans un exercice de drague douteux –, on passe à son fils (également la tête à l’envers) regardant la catastrophe à la télévision, puis plus tard à son regard bouleversé sur le journal. Dans ce dispositif allégorisant l’enfance non résolue de David, l’ordinaire se meut en fantastique à mesure que David reprend les rênes de sa vie et de son identité. Persiste néanmoins toujours un doute – les héros existent-ils réellement ? – jusqu’au troisième volet de la trilogie, Glass (2019). Incassable est peut-être un film parfois légèrement ronflant, mais riche de
nombreuses interprétations – preuve que le cinéma de Shyamalan s’avère bien plus complexe qu’il ne le laisse transparaître.

Ce que le film apporte au thriller

Sous couvert d’un mystère touffu, atmosphère bizarrement émouvante et effrayante, Shyamalan se risque en réalité à une question universelle : quelle place occupons-nous dans ce bas monde ? Après l’au-delà (Sixième sens, 1999), le cinéaste inscrit son propos dans le tangible. Du thriller philosophique à la frontière du métaphysique.